Grand ménage au Consistoire en vue de l'élection du Grand Rabbin de France

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Le 22 juin 2014,  l’Assemblée Générale du Consistoire Central élira le Grand Rabbin de France. Un mois avant cette assemblée, plusieurs délégués figurant sur la liste des électeurs, publiée le 14 mai, ont vu quelques jours plus tard leur nom passer à la trappe. Une décision prise par Joël Mergui, Président omnipotent de l’Institution, pour qui la moindre kippa qui dépasse, et la perspective d’un futur Grand Rabbin de France qui imposerait sa personnalité et lui ferait de l’ombre, remettrait en cause son goût du pouvoir absolu.

 
Parmi les 315 délégués appelés à élire le Grand Rabbin de France, figurent pour le Consistoire de Paris 120 personnalités, parmi lesquelles des présidents et responsables de commissions administratives de communautés, mais également des personnes extérieures à celles-ci, gage d’une ouverture vers les diverses composantes du judaïsme français. Ainsi, figuraient notamment sur cette liste publiée le 14 mai le docteur Lazare Kaplan, administrateur de l’OSE, Président du Maguen David Adom France, fils du Grand Rabbin Jacob Kaplan. On trouvait également, parmi la petite dizaine de personnes qui ne « poursuivront pas l’aventure », le nom du Professeur Claude Nataf, Président de la Société d’Histoire des Juifs de Tunisie et éminent spécialiste de l’histoire du Consistoire.
 
Plusieurs courriers adressés à Joël Mergui par ces derniers pour connaître les raisons de leur éviction, 6 jours après la parution de la liste des électeurs sur laquelle ils figuraient, sont évidemment restés sans réponse, et c’est le Président de la Commission Juridique de l’ACIP, Elie Korchia, qui a du s’y coller, expliquant poussivement en novlangue consistoriale que tout était normal, car l’objectif a donc été ici de s’inscrire dans la parfaite continuité de ce qui existait auparavant tout en respectant le principe entériné par le Conseil d’administration de l’ACIP au mois de janvier 2014, à la suite des dernières élections au Consistoire de Paris, afin d’avoir une liste de délégués et suppléants liés intégralement et intrinsèquement au fonctionnement de notre Institution. 
 
Seul problème, ni Elie Korchia, et encore moins Joël Mergui, ne répondent à la question qui fâche : est-il possible, légal ou réglementaire de modifier la liste des délégués de l’ACIP un mois avant l’assemblée chargée de choisir le nouveau Grand Rabbin de France ? Et tant qu’on y est, ajoutons pour la bonne bouche la désignation arbitraire d’électeurs n’ayant aucune fonction communautaire, ou ayant des liens familiaux avec le Président du Consistoire, afin d’ancrer cette vénérable institution dans des pratiques dignes du népotisme le plus parfait. Joël, ou plutôt Jean-Bedel Mergui au pouvoir.

 
Si l’on doit admettre que l’éviction de moins d’une dizaine de délégués ne changera pas fondamentalement les données du scrutin, sauf en cas d’élection très serrée entre les 3 candidats a priori pressentis comme favoris de l’élection depuis la « défection » du Grand Rabbin Guggenheim pour cause de «Prix de la liberté» (non, il ne s’agit pas de course hippique), à savoir les rabbins Berros, Kaufmann et Korsia, on ne peut que déplorer des méthodes dignes du Brejnev de la grande époque.
 
Dans sa réponse adressée à Elie Korchia, l’historien Claude Nataf souligne qu’il a connu le Consistoire à une époque où ses dirigeants ne pensaient qu’à l’honneur de servir l’Institution et leurs coreligionnaires, n’acceptaient pas de décorations pendant la durée de leur mandat – sauf à titre militaire -, avaient un respect absolu de la règle de droit et se réjouissaient des débats et des critiques car ils y voyaient la preuve de l’intérêt que les adhérents portaient à l’Institution et qui ne pouvait que la  vivifier. Claude Nataf ajoutant : C’est la fidélité à cet esprit consistorial qui me fait agir encore, mais je reconnais qu’après la dernière assemblée générale, j’ai compris et admis l’attitude de ceux qui se désintéressaient de la vie de l’Institution, voire la quittaient pour d’autres courants orthodoxes ou libéraux.
 
Censé représenter toutes les composantes du judaïsme français, le Consistoire, devenu une institution sclérosée et rétrograde, fragilisée par de multiples scandales, est désormais dirigé par un Président qui cumule, outre la fonction de Grand Rabbin de France par intérim (on a pu l’admirer à la télévision lors des cérémonies de commémoration du D-Day, parader auprès des divers prélats représentant les cultes de France, en l’absence remarquable des Grands Rabbins de France par intérim en exercice), celle de technicien de surface.
 
Alain Granat, directeur de la publication de Jewpop
© visuel : DR

Article publié le 10 juin 2014. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2014 Jewpop
 

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