Joan Nathan est célèbre aux États-Unis pour ses livres à succès sur les cuisines juives américaine et israélienne, et pour ses émissions de tv culinaires récompensées par de nombreux prix. Son livre “Quiches, Kugels, and Couscous: My Search for Jewish Cooking in France” (Knopf) explore les liens entre traditions culinaires françaises et celles des communautés juives du pays. Dans un article que lui consacre la journaliste Leah Koenig, publié sur le site du Jewish Daily Forward, on s’amuse d’abord des quelques clichés véhiculés par l’auteur, dont la vision des tables familiales juives en France est franchement risible.
Ainsi, on y apprend que « Si les Français juifs peuvent acheter leur viande chez un boucher casher, ils apprennent à leurs enfants à se tenir comme il faut (en français dans le texte), selon les codes des bonnes manières françaises, sur une table élégamment dressée ». Et réjouissant de constater que, vu des USA, acheter sa viande chez un boucher casher conduirait à se baffrer comme un gros dégueulasse, les doigts dégoulinant de mloukhia.
Passé ce léger défaut typiquement américain (les clichés ont la vie dure…), le livre de Joan Nathan est une mine d’informations sur l’influence des traditions culinaires juives dans la gastronomie française. Comme l’introduction du chocolat à Bayonne au 17ème siècle par des Juifs venus du Portugal après l’Inquisition, qui feront de la ville basque la première cité chocolatière du pays, avant d’en être bannis en 1691 par des concurrents chrétiens, devenus à leur tour négociants et artisans chocolatiers.
Selon Joan Nathan, le foie gras, emblème incontournable des agapes de fin d’année en France, aurait également été introduit dans notre pays au Moyen-Âge par les Juifs. Elle cite notamment un commentaire de l’illustre rabbin Rachi, qui dénonça le gavage des oies par les Juifs en prédisant qu’ « Israël paiera un jour le prix de ces oies, pour avoir fait souffrir ces animaux en les engraissant de force ». Notre conseil : demandez à votre boucher casher si son foie gras provient d’oies gavées. Si la réponse est positive, interdiction de vous régaler du produit de la maltraitance de malheureux volatiles rendus obèses sous la pression !
Au-delà de l’aspect historique passionnant du livre, son auteur s’est attaché à recueillir des recettes liées aux histoires des diverses communautés juives françaises, ashkénazes et sépharades, au travers de celles de familles et personnalités issues des diverses vagues d’immigration. Tels Françoise Tenenbaum, maire-adjoint de Dijon, qui livre sa recette de brioche aux cerises, Huguette Uhry, originaire d’Alsace, qui réalise une challah pour les fêtes de Rosh Hashana nécessitant deux jours de préparation, ou encore Michel et Françoise Kalifa (l’un originaire du Maroc, son épouse d’une famille venant de Pologne), gérants de la célèbre boucherie David (rue des Ecouffes à Paris), qui révèlent leur recette de foie haché au confit d’oignons.
Un livre à dévorer absolument (avec l’aide d’un dictionnaire d’anglais si besoin), avant de passer en cuisine et régaler vos convives de ces recettes si savoureuses (en français dans le texte).
Jewpop
Michel Kalifa dans sa célèbre « Maison David »
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Article publié le 3 novembre 2010. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2019 Jewpop
Golde est extraordinaire ! elle me rappelle toutes ces femmes de ma famille qui sont mortes hélas ! J'essaie de faire mais tout ce que je fais n'a jamais le "tam" de ce qu'elles faisaient !
Le faire est déjà un joli moyen de les garder en mémoire, même si la saveur n'est pas la même ! Bravo pour la transmission 🙂