Pour donner la parole aux femmes victimes de chantage au guett, nous créons un hashtag #stopchantageauguett. Ainsi les femmes pourront raconter leur histoire de chantage au guett.
À Grenoble, pour la première fois en France, des sanctions religieuses ont été prises par les rabbins Nissim Sultan et Méïr Knafo sous l’autorité du grand rabbin de France, Haïm Korsia, contre un mari qui refuse le guett* à sa femme. Dorénavant et jusqu’à la remise du guett, ce mari récalcitrant ne pourra plus participer à la prière synagogale, sera exclu du minyan, le quorum de dix participants nécessaires à la prière, et cette décision sera placardée dans les synagogues.
Cette action contre ce mari qui exerce un odieux chantage est totalement inédite en France. En effet, jusqu’ici, certains rabbins peuvent se montrer complices et incitateurs du chantage, et d’autres reçoivent ces maris récalcitrants avec égards et bienveillance, sans toutefois se soucier du sort de leurs épouses.
Pour la première fois en France, des rabbins ont pris des mesures, pour défendre les femmes et honorer le judaïsme. Saluons leur initiative !
Ce scandale du chantage au guett, pour l’avoir vécu moi-même, je l’ai raconté il y a quelques années dans un livre, “Et te voici permise à tout homme”. C’était l’histoire d’une femme qui voulait divorcer, mais son mari lui refusait le guett. “Ton guett, tu ne l’auras jamais” lui dit-il. Il indiqua à son avocate qu’il allait s’en servir comme monnaie d’échange dans le règlement du divorce civil.
Elle est allée voir les rabbins du service des divorces au Consistoire, qui lui ont dit : “Madame, un guett ça s’achète”. Alors ils ont proposé de négocier l’achat du guett. Ils lui ont demandé ce qu’elle avait à céder. Ils se proposaient de négocier pour elle l’achat. Elle possédait un appartement. Alors ils ont proposé au mari de donner le guett contre l’appartement.
Lorsqu’elle a trouvé une façon d’annuler son mariage par un tribunal rabbinique orthodoxe à cause d’un vice de forme, le chef du service des divorces du Consistoire a refusé de reconnaître l’annulation. Ce n’est pas une histoire inventée, hélas. Tout ce que je raconte dans ce roman est la vérité.
Ces gens qui se servent du guett pour exercer un chantage, font ce qu’il y a de pire pour une femme et pour une mère. L’empêcher de vivre sa vie, en utilisant la religion de façon perverse.
En faisant cela, ils bafouent non seulement la mère et la femme, sans égard pour les enfants, mais ils ruinent définitivement toute relation parentale entre les époux divorcés. En détournant la religion, en l’utilisant contre la femme, ils bafouent son statut même d’être humain. Et ce calvaire n’est pas infligé par notre religion juive qui est humaine, mais par certains de ses représentants actuels : responsables passifs ou actifs de cette abomination, cette torture psychologique, physique et morale des femmes aujourd’hui.
Cette situation doit cesser. Si certains rabbins savaient ce qu’une femme endure lorsqu’elle vit cette situation, si on les y soumettait ne serait-ce qu’un mois, peut-être agiraient-ils différemment vis-à-vis des femmes qu’ils traitent comme des ignares, des êtres indignes d’être écoutés et d’être aidés, au mépris des principes mêmes qu’ils prétendent représenter, des êtres indignes d’avoir des relations sexuelles pendant des années, puisque sans guett, les femmes seraient considérées comme adultères. Des êtres à qui l’on enlève le droit d’avoir des enfants, puisque ces enfants seraient des mamzerim, des bâtards.
Garder une femme prisonnière d’un mariage inexistant, d’un mari, d’une injustice, d’une situation où le mari utilise le divorce religieux pour faire un chantage ou pour ne pas appliquer la décision du juge civil, est en contradiction non seulement avec nos principes, mais aussi avec l’état de droit dans lequel nous vivons.
La complicité des rabbins du service des divorces en France est inacceptable. Toutes les explications du monde ne justifieront pas ce triple manquement aux lois fondamentales du judaïsme, celles qui protègent la dignité et la liberté de chacun.
Pour la première fois, le grand rabbin de France et les rabbins de Grenoble ont eu le courage de dénoncer cette situation et sortir le judaïsme de l’opprobre dans laquelle certains continuent de le plonger. Que leur nom soit béni ! Et puissent-ils être suivis par tous !
Pour donner la parole aux femmes, nous créons un hashtag #stopchantageauguett, racontez-vos histoires de chantage au guett.
Éliette Abécassis et Liliane Vana
Éliette Abécassis est écrivain et philosophe
Liliane Vana est professeur, spécialiste en droit hébraïque, talmudiste, philologue et fondatrice de LectureSefer, courant orthodoxe
*document légal rédigé à la main sur un parchemin, au moyen duquel un homme divorce de sa femme selon la Loi juive.
© visuel : Shay Charka /DR
Article publié le 8 juillet 2018. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2018 Jewpop
Chantage au guett : une initiative courageuse du grand rabbinat de France
7 minutes de lecture
non seulement les choses n’évoluent pas mais elles empirent : dérapages et scandales en sont hélas le triste spectacle
mais le problème n’est-il pas ,en fait , à la racine de la construction du guet ?
c’est à dire le seul verset de ki-tétsé (24, 1) : comment la torah orale, a partir de ce seul verset a t’elle pu construire un tel dispositif et élaboré un texte aussi révoltant que le texte du guet – vé partarti, vé hazavti vé garachti …je te congédie, t’abandonne, te chasse … douces paroles du mari-baal à sa femme
comment prétendre que cette loi orale est d’inspiration Divine, alors qu’il est clair que ce qui est en jeu, c’est la maladresse et l’interprétation abusive purement humaines.
mais encore faut-il avoir le courage d’aller au fond des choses : n’est-ce pas notre devoir a tous ?
je ne suis qu’un juif bénoni, et non expert de ces questions : alors que les rabbins spécialistes du sujet justifient l’existence de telles lois !
et à l’adresse des maris qui veulent faire du chantage , voici ce que j’ai écris à ma femme aprés mon divorce :
je veux te dire et affirmer bien haut :
que je ne suis pas ton baal
et c’est tout à fait normal
qu’à défaut de maitre, tu avais un mari
ce mari qui maintenant te dit
non, ce n’est pas moi qui te congédie
je ne te chasse pas , je ne te rejette pas,
de tout cela je ne veux pas
de garech, il n’est pas question,
je refuse les mots (maux) de la tradition,
tu as été pendant de longues années,
mon épouse , mon aimée,
mais notre couple a succombé
il faut maintenant en convenir.
Puisses tu trouver un meilleur avenir
Pardonne moi d’avoir échoué
et dans une nouvelle liberté
trouver ce que je n’ai pu t’apporter
et aussi un rappel des paroles du prophéte Osée :
et a cette époque dit l’Eternel
tu m’appelleras ‘mon époux’ ( mon homme ‘ichi’))
tu ne m’appeleras plus ‘mon Baal’ (mon maitre ‘baali’)
Quelle belle initiative …. et tellement inutile!! Les maris récalcitrants se fichent éperdument d’être comptés dans le Minyan! Encore moins d’être mis en herem. C’est comme empêcher un alcoolique de boire dans un verre : il boit à la bouteille . La seule et unique façon de remédier a ce scandale humain et religieux est de changer la la ketouba. Tout est possible c’est juste une question de courage. Car enfin, il va falloir un jour nommer l’innommable: la moitié du peuple juif est potentiellement esclave de l’autre puisque sans Guet, une femme ne peut ni aimer ni vivre sa sexualité ni avoir d’enfants , ceux ci étant pour 10 générations dans l’interdit de se marier avec une personne juive de naissance et non mamzer.
c’est une relle désinformation que de voir dans cette « nouvelle » quoique ce soit de nouveau.
Une bonne vieille action civile en dommages-intérêts ( art 1382 c.civ.) est plus efficace: elle frappe le mari récalcitrant au portefeuille …
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