Une réunion Super Aware, c’est comme une réunion Tupperware sauf que la seule boîte dont on parle, c’est la boîte crânienne. Lundi 13 avril 2015 à 19h30, en service commandé et consentant pour Jewpop, je me suis rendue à une soirée de méditation juive, plus précisément à une soirée de méditation de pleine conscience à travers les valeurs du judaïsme.
Dans un très bel appartement haussmannien avec moulures et parquet situé dans le 7ème arrondissement de Paris, si grand que pour le nettoyage de Pessah il faut se prévoir 72 jours de RTT, le cours était animé par Laurent Edel, coach et dirigeant de la société de conseil Good Futur, Laurence Bibas, enseignante de méditation de pleine conscience, et Yeshaya Dalsace, rabbin massorti. Présenté ainsi, je m’attendais à voir débarquer en guest-star et secte-symbol Tom Cruise en kippa et tsitsit. Raté. Nous étions une quinzaine de personnes, majoritairement des femmes élégamment habillées, décontractées, humbles et curieuses, assises en cercle sur des canapés, prêtes à vivre l’expérience de la pleine conscience, à être emportées par la full.
Pour ce premier soir autour des thèmes de liberté et d’acceptation à travers les fêtes de Pessah et Chavouot, nous avons suivi cinq exercices.
Exercice 1 – une méditation sur la respiration
« La méditation en pleine conscience, explique Laurence Bibas, c’est apprendre à diriger notre attention sur soi au présent avec bienveillance, c’est apprendre à être son meilleur ami. » Alors, nous nous sommes concentrés sur notre respiration, notre corps, notre présence là, guidés par la voix de l’enseignante. Totalement en détente, l’esprit ouvert en moins de deux minutes. Détente Queshua.
Exercice 2 – le seder méditatif
Laurent Edel nous a distribué des assiettes avec de la matza Rosinski, du persil, du raifort et de l’harosset. « Pessah est une fête qui touche à l’alimentation, elle joue avec les goûts, déclare Yeshaya Dalsace : le neutre de la matza, l’amertume des herbes, l’acidité du raifort, le sucré de l’harosset. Faire une bénédiction avant de manger, c’est prendre conscience de l’aliment, c’est être en pleine conscience de manger. » Alors, nous nous sommes concentrés sur cette nourriture avec nos 5 sens, la vue, l’odorat, le toucher, le goût, l’ouïe. En chaussettes, à l’aise, à côté de nos pompes, nous avons fait le plein des sens.
Exercice 3 – une méditation sur les sons
« La méditation sert à apprivoiser le silence, à porter notre attention sur le moment présent » selon Laurence Bibas. Alors, nous avons fermé les yeux et nous nous sommes concentrés sur les bruits alentours. Une méditation dite «ouverte sur l’environnement» pour s’entraîner à être attentif. Le rabbin massorti de secours a alors fait le rapprochement avec la fête de Chavouot liée au don de la Torah, ce moment géant où les Hébreux ont entendu la parole divine. Selon le rabbin, dans le judaïsme, il y a cette capacité à entendre au-delà de l’écoute immédiate. Bref, nous avons l’ouïe d’or.
Exercice 4 – l’observation d’un mur
Séquence dégourdissement des jambes et exode mural. Pour cet exercice, nous avons chacun observé un mur et dit ce que nous avons vu. Zéro lamentation, zéro statut, zéro like, chacun a vu et décrit un détail aussi insignifiant soit-il ; qui un clou, qui une poignée, qui un pan de peinture, qui l’ourlet défaillant de son camarade de je. L’occasion pour nous de faire marcher notre imagination, et pour Yeshaya Dalsace de faire le rapprochement avec le judaïsme et ses exégètes, qui trouvent un sens au moindre détail dans la Torah. Une métaphore en béton.
Exercice 5 – le rapport à la douleur
« Le rapport à la douleur est fondamental dans le judaïsme. » Là-dessus, personne ne contredira Yeshaya Dalsace. Si en hébreu, les lettres ont une valeur numérique comme au Scrabble, c’est parce que chez les Juifs, les maux comptent triple. Selon Laurence Bibas, « nous avons un rapport aversif avec la douleur. La méditation corporelle va servir à accepter la douleur et la souffrance de façon créative. » Alors, nous avons fermé les yeux, nous avons cherché une position inconfortable et nous nous sommes concentrés sur là où cela commençait à faire mal. Lorsque nous avons atteint les feux de la crampe, nous nous sommes efforcés d’attendre d’être en pleine conscience de la douleur pour réagir, et enfin nous ajuster pour être mieux. De véritables jets d’aïe.
Au final, ces deux heures de méditation juive au sortir de Pessah, ont été une expérience inédite, une occasion de se détendre, d’aborder des idées originales avec douceur, et de voir de nouvelles têtes sans chercher à se juger les uns les autres. Bref, passer du remue-ménage au remue-méninges.
Ingrid Zerbib
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Les prochaines séances de méditation juive ont lieu le 4 mai (thèmes : crise, jugement) et le 1er juin (thèmes : lâcher prise, harmonie, joie).
Renseignements et inscription auprès de Laurent : goodfutur@hotmail.com
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© photos : Ingrid Zerbib
Article publié le 24 avril 2015. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2015 Jewpop