Le 27 décembre 1999, Jamaal Barrow, plus connu dans le monde du hip hop sous son nom d’artiste Shyne, se trouve au Club New York, célèbre boîte de nuit de la Grosse Pomme, en compagnie de Puff Daddy et de sa fiancée d’alors, Jennifer Lopez. Une bagarre éclate entre Puff Daddy et un client, Shyne sort une arme et tire plusieurs fois « en l’air », blessant gravement trois personnes.
Le rappeur, alors membre de l’écurie du mythique label Bad Boy Records fondé par Sean Combs aka Puff Daddy, est arrêté peu après, jugé pour tentative de meurtre et condamné à 10 ans de prison en 2001.
C’est en 2006 qu’il demande à changer légalement de nom, devenant Moses Michael Levi. Après avoir purgé 9 ans de sa peine, il est libéré en 2009, interdit de séjour aux USA (originaire de Belize, il se voit contraint d’y séjourner) et se convertit au judaïsme, tendance orthodoxe. Il a vécu ensuite à Jérusalem, avant de quitter le monde orthodoxe pour retourner à Belize.
“Rien dans la Torah n’indique que je ne doive pas conduire une Lamborghini”
Dans une interview donnée au New York Times, Moses Levi, ayant troqué la panoplie hip hop pour les vêtements traditionnels des juifs orthodoxes, raconte sa rédemption et sa découverte du judaïsme, s’appropriant un mélange détonant de « hip hop style » et de convictions talmudiques. « Rien dans la Torah n’indique que je ne doive pas conduire une Lamborghini », affirme le rappeur, ajoutant qu’il avait commencé à lire la Bible à l’âge de 13 ans (notant au passage qu’il s’agit de l’âge de la bar-mitzvah) et qu’il s’était très vite identifié aux Israélites, et en particulier au roi David, quand il zonait dans Brooklyn. Un sentiment d’appartenance au judaïsme renforcé, selon lui, par la découverte des origines éthiopiennes de sa grand-mère maternelle, dont il recherche maintenant les éventuelles origines juives.
Sa pratique religieuse s’est développée en prison sous l’égide de rabbins-aumôniers, il s’est ensuite converti en Israël selon la très stricte procédure « giyur lechumra » en étudiant auprès de rabbins orthodoxes, tout en préparant son come-back musical. Un retour finalement très confidentiel, avec le single « Messiah » (2010), la mixtape « Gangland » (2012), téléchargée toutefois par 100 000 fans, et quelques rares featuring aux côtés de Matisyahu, Lil Wayne et Pharrell Williams ces mêmes années. On le voit poser auprès de son ex-boss Puff Daddy lors d’un défilé Kenzo à Paris en 2012, vêtu du traditionnel caftan noir porté par les haredim, puis évoquer une possible carrière politique lors des élections à Belize en 2017, sans suite…
Shyne et Puff Daddy au défilé Kenzo de la fashion Week à Paris en 2012
Clash avec 50 Cent
Depuis 2012, la carrière musicale de Shyne est au point mort, et c’est encore le passé qui lui permet de faire parler de lui dans le monde du hip hop, avec une interview donnée le mois dernier au magazine Hip Hop Edition dans laquelle il accuse 50 Cent d’avoir été un informateur de la police. Une accusation déjà proférée par d’autres rappeurs rivaux de l’auteur d’In Da Club, et étayée par des documents du NYPD.
Après son étape orthodoxe, l’envie de clash a repris le dessus et Shyne a sans doute oublié à l’insu de son plein gré ce principe fondamental du judaïsme qui interdit le lachon hara (en hébreu « langage du mal »), proscrivant toute parole pouvant causer du tort à autrui. Les vieux démons du rap ont la vie dure… avec ou sans kippa.
Lou Levy
© photos et visuels : DR
Article publié le 23 janvier 2019. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2019 Jewpop
incroyable conversion, vivement Jay-Z ou Kanye…