On aurait aimé ne pas faire d’amalgame entre Gilets jaunes et antisémitisme. Mais les tags et autres slogans complotistes et antisémites se propagent sans frein au sein et en marge des manifestations du mouvement, et la multiplication des violences verbales, conspirationnistes, racistes, homophobes, et d’images antisémites qui les parcourent est édifiante. La souffrance sociale, aussi insupportable qu’elle puisse l’être, n’excuse rien. Un autre amalgame, juif=argent=pouvoir est désormais bien ancré dans le mouvement Gilets jaunes, désespérément silencieux sur le sujet à de rares exceptions, et exploité par les extrêmes de tous bords qui s’y greffent et le récupèrent.
Gilet Juden ?
Jean Yves D’Angelo est compositeur et pianiste, il collabore depuis de nombreuses années avec Michel Jonasz
Le dernier tag en date, qui a souillé de croix gammées deux boîtes aux lettres de la mairie du 13ème arrondissement de Paris, figurant une création de l’artiste Christian Guemy dédiée à Simone Veil lors de sa panthéonisation, a provoqué de nombreuses réactions indignées, tout comme celui maculant d’un « Juden » la vitrine d’une boutique Bagelstein dans la nuit de vendredi, façon « Nuit de cristal ». Nulle preuve évidemment qu’il s’agisse là de l’œuvre de Gilets jaunes, mais les signes d’une dangereuse concordance et convergence se multiplient, d’une députée LREM traitée de « youpine » sur les réseaux sociaux après un débat télévisé avec des meneurs du mouvement, à la récurrence du procès en collusion « juive » d’Emmanuel Macron, traité de « pute à juifs », tandis que les références à Rothschild et autres noms emblématiques d’une obsession de « complot juif » pullulent lors des manifestations, que des insultes antisémites sont proférées au passage d’une manifestation à la sortie d’une synagogue à Strasbourg ou à Toulouse, en passant par les quenelles prisées des fans de Dieudonné et Soral en Gilets jaunes, les propos racistes sur les migrants, le tout couvert par le silence assourdissant de ceux qui refusent de dénoncer les extrémistes qui marchent avec eux, ou les tolèrent.
Sous le gilet jaune, la chemise brune ?
Les arguments soulevés par ceux qui estiment qu’il s’agit d’épiphénomènes issus majoritairement de l’ultra-droite, sont chaque semaine qui passe cruellement contredits en images et en sondages. Ainsi Claude Askolovitch qui dans Slate en décembre pourfendait avec emphase ceux qu’il nommait ironiquement les juifs « vigilants », ces « bourgeois » juifs supposément opposés au peuple, qui alertaient déjà sur ce phénomène de chemise brune mal planquée sous le gilet jaune. Esprit munichois, quand tu nous tiens…
1 Français sur 4 (et plus de 40% chez les Gilets jaunes) est persuadé de l’existence d’un « complot sioniste mondial »
Les Gilets jaunes et leurs leaders « officiels » portent une lourde responsabilité dans cette recrudescence et libération de la parole raciste, antisémite et complotiste en France. Chaque manifestation voit fleurir son lot de slogans dignes de Maurras, tandis qu’une récente étude de l’Ifop pour la Fondation Jean Jaurès et l’observatoire Conspiracy Watch souligne qu’un Français sur quatre est persuadé de la réalité d’un « complot sioniste mondial », et pense que l’attentat de Strasbourg est une manipulation du gouvernement, avec une proportion dans les 2 cas massive chez les Français se revendiquant Gilets jaunes. Qui parmi leurs leaders, qui parmi la multitude des manifestants, qui parmi leurs soutiens affichés, élève la voix pour dénoncer cela ? On a plus entendu Maxime Nicolle tenir des propos complotistes et fanfaronner sur son exil politique bidon que sur le sujet.
« Je suis partout », le retour
Quand François Berléand exprime dans une émission de radio son ras-le-bol du mouvement, le négationniste Hervé Ryssen, paradant en gilet jaune pour les besoins de sa cause, rappelle l’ascendance juive du comédien, ses grands-parents déportés à Auschwitz, et appelle ses nervis à manifester devant le théâtre où il se produit. « Je suis partout » fait son grand retour en 2019, incubé et boosté par les réseaux sociaux, premier vecteur de lien entre les Gilets jaunes et leur seule source d’«information », Facebook, les médias étant selon eux vendus au pouvoir et aux lobbies (suivez mon regard, Drahi & co…).
Il est grand temps que l’on prenne les mesures judiciaires et républicaines qui permettront de faire taire les racistes et antisémites qui se manifestent sans retenue depuis plus de trois mois, et ne sont pas représentatifs de la majorité du peuple français. Au risque de devoir passer à la méthode scalp chère à Brad Pitt, sans doute la plus efficace pour briser net cette recrudescence inquiétante de « nazis au petit pied », comme disait Simone Veil.
Alain Granat
© photos : DR
Article publié le 12 février 2019. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2019 Jewpop
Merci jew pop de nommer les choses sans faux semblants, de façon aussi claire
bon article meme si deprimant
Je viens de lire la tribune de D. Horvilleur sur le même sujet dans Le Monde, bien plus plate et consensuelle, très déçue… Merci de dire haut et fort ce que ce mouvement charrie et laisse passer sans réagir.
D’accord avec vous, je viens de lire cette tribune du Monde, bref c’est du Delphine Horvilleur… Agréablement écrit, mais vide comme son histoire de trou de son bagel 😉
Ah! Je pleur. Vraiment vous avez osez SANS CRANTE. Ça se comprend.
[…] Cliquez ici pour lire la suite Tags et slogans antisémites se multiplient au sein et en marge des manifestations de Gilets jaunes […]
C’est un plaisir récent mais toujours renouvelé que la lecture hebdomadaire de jewpop, le meilleur antidote à Hanouna. Mais permettez-moi de vous suivre dans le raisonnement « trop c’est trop » :
Mâle blanc quinquagénaire de culture catholique mais apostat, j’estime avoir suffisamment oeuvré dans le sens d’une compréhension de l’holocauste, de la défense de l’identité et de la culture juive et ce de façon très concrète et largement au-dessus de la moyenne des zélotes qui s’agitent sur les plateaux télé mais cautionnent les méthodes de nazis aux petits pieds des médias parisiens (persécution, spoliations, négation des droits fondamentaux).
Je ne dois rien à ceux des Fançais juifs qui se pensent en communauté et voudraient m’assigner à une responsabilité qui n’est pas la mienne, pour des crimes qui ne sont pas les miens, mais contre lesquels j’ai pourtant lutté quand leurs enfants-roi se vautraient dans la complaisance, la vulgarité et l’argent facile.
C’est donc cette « communauté » qui me doit, aujourd’hui, à tout le moins, de dénoncer pour m’en protéger ceux d’entre eux qui, tout en assurant
respecter les principes de leur religion, les violent au quotidien et me font la vie pire que celle d’un animal domestique depuis 15 ans.
Trop c’est trop.