Romans, films, photos, dessins… Valérie Mréjen nous surprend depuis 20 ans. Elle est désormais représentée par la galeriste Anne-Sarah Bénichou.
Un duo fait aujourd’hui beaucoup parler de lui dans le paysage artistique contemporain : celui de l’artiste Valérie Mréjen et de la galeriste Anne-Sarah Bénichou. Cette jeune femme représente aujourd’hui sept artistes parmi lesquels donc Mréjen. Elle nous raconte cette rencontre : « Ami Barak, commissaire d’exposition et directeur du Salon de Montrouge, m’a parlé de son travail que je connaissais un peu. Il m’a vivement recommandé de me replonger dans son œuvre. Tout en m’en parlant, il commande cinq livres de Valérie sur Amazon, dont un contient un de ses plus célèbres films : Dieu. Un court-métrage adapté du documentaire Pork & Milk réalisé par Valérie en Israël. Les livres arrivent donc deux jours plus tard et j’ai ainsi pu mieux découvrir l’ampleur de son talent. À la suite de cela, je l’ai contactée. On a pris un café ensemble. Elle n’était plus présente en galerie depuis deux ans. Elle était représentée auparavant par la galerie de Serge Le Borgne, un très grand galeriste qui est parti à la retraite. Les nombreuses activités de Valérie ne lui permettaient pas d’avoir assez de temps pour chercher une autre galerie suite à la fermeture de celle de Serge Le Borgne. »
La première fois que j’ai rencontré Valérie Mréjen, c’était lors du Salon du Livre de Paris en 2000. Elle y présentait le livre Mon grand-père. J’avais été particulièrement touché par ce livre et souhaitais le faire dédicacer pour quelqu’un qui avait perdu son père, Nuchem Bodner. Je lui ai donc demandé une dédicace pour Henri. À ma surprise, elle avait dessiné une fleur. Ce genre de dédicace était plutôt réservé au stand bd.
Livres d’artistes
Ce n’est que plus tard que j’ai découvert, compris, les multiples talents de Valérie Mréjen. Une reconnaissance encore trop rare, comme le confirme Anne-Sarah Bénichou : « En France, on a encore du mal à accepter qu’une personne puisse tutoyer plusieurs arts. Valérie est une de ces rares exceptions contemporaines. Elle mène en parallèle cette carrière de plasticienne en galerie et musée. L’expo du Jeu de Paume concernait uniquement la vidéo. Elle est aussi reconnue comme romancière de talent. C’est un honneur rare dans ces deux milieux. En général, les artistes qui flirtent avec l’écriture, cela se limite à des livres « d’artistes ». Et inversement. »
Comme disait Jean-Paul Belmondo dans Un Singe en hiver, plus un homme est grand, plus il est seul. Il n’est pas facile d’écrire sur l’œuvre d’un grand artiste contemporain. Cette solitude nécessaire pour travailler, trouver l’équilibre entre le recul nécessaire vis-à-vis des champs d’observation et le contact ponctuel encouragé voire forcé avec les sujets de tutoiement. Loin, très loin du tourbillon audiovisuel.
Vitesse et brutalité
De nos jours, vitesse et brutalité se confondent pendant que certains essayent de réconcilier les sens et le temps. Mais il y a un accompagnement indispensable, qui évite que les œuvres d’un artiste solitaire souffrent de solitude. Celle des galeristes qui ne se cachent pas derrière une enseigne mais se lient d’amitié avec ceux qu’ils représentent. Qu’ils fasse un bout de chemin ensemble non pas le temps d’une expo mais le long de l’évolution de l’œuvre, accompagnent le travail sur du long terme, les expositions devenant des paliers vers un accomplissement qui se partage avec le public et se comprend (ou pas) par les critiques.
Valérie Mréjen va être présente à de nombreux événements aussi bien à Toulouse, Lyon ou Montréal. Et c’est à Marseille que débute cette année très chargée avec une participation au salon Paréidolie. La Galerie Anne-Sarah Bénichou y présente des œuvres liées par le thème de la narration. Valérie Mréjen y présentera la série « Grandmas ». Trois autres artistes de la galerie seront également exposés : Chourouk Hriech, Julien Discrit et Massinissa Selmani.
Les slogans publicitaires qui confortent les générations successives autour de l’image rassurante des grands-mères fendent l’armure des néons, aciers et plexiglas, des slogans péremptoires, pour se trouver secoués, floutés par la charge artistique de Mréjen. Elle en retire l’essentiel, ces mots doux de personnes qui ne souhaitent pas qu’on les colle sur des étiquettes de pots de confiture mais qui vont, comme dans Eau sauvage, un livre de Mréjen, prendre le temps d’aller chercher un gâteau au fromage à Saint-Paul pour leur descendance.
Steve Krief
Galerie Anne-Sarah Bénichou, 45 rue Chapon, 75003 Paris.
Salon Paréidolie, les 26 et 27 août au Château de Servières , Marseille
Valérie Mréjen est lauréate 2014 du prix Francine et Antoine Bernheim dans la catégorie « Arts », décerné sous l’égide de la Fondation du Judaïsme Français.
Article paru dans l’Arche (nouvelle formule trimestrielle) du mois de juillet 2017, publié avec l’aimable autorisation de son auteur.
© photos : Stéphanie Solinas / DR
Article publié le 12 juillet 2017. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2017 L’Arche / Jewpop