Ashkénazes vs Tunisiens, le combat des groupes Facebook

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Jewpop a testé les groupes Facebook « Tu sais que tu es… » côté ashkénaze et tunisien.

 

 Les juifs de la Corniche vs les juifs des cornichons

 
Chez les Tunes, le ton est donné dès le début avec la description du groupe : « Honorez la mémoire de vos ancêtres à travers ce groupe et que d’en haut avec Baba Salé… ». Bon, Baba Salé, ça n’a rien à voir avec celui aux lentilles avec du porc dedans, c’est un barbu et en plus il est né au Maroc, ça commence bien. Alors que chez les Ashkés, pas besoin de savoir à quoi sert le groupe, c’est comme une analyse : « commence déjà… et après tu verras bien où ça mène ! ». Pour ce qui est des barbus, ils ont été éradiqués il y a bien longtemps. Les Ashkés se tapent dessus dès qu’il s’agit de religion, c’est Auschwitz qui en fait office et met tout le monde d’accord. Et la politique aussi. À droite toute sinon gaffe à ton tokhes (cul en yiddish) !

 

La loi du nombre

 
Force est de constater qu’en quelques années, le groupe des Ashkés a vu le nombre de ses membres augmenter à une vitesse inouïe, avec un peu plus de 10 000 profils, rejoignant presque celui des Tunes côté nombre. Avec leur morgue coutumière, ils vous répondraient que « ce n’est pas la quantité qui compte, mais la qualité », si ce n’est que les Tunes, c’est un peu les Palestiniens des Ashkés, ils ont l’avantage du taux de natalité. Bref, ils domineront le monde si ça continue, et faut pas compter sur les Ashkés pour repeupler le Yiddishland. C’est vrai que maintenant qu’ils savent que le nouveau-né, c’est un futur-mort, ça tue toute velléité de famille nombreuse, même virtuelle… Au masculin comme au féminin, le ou la Tune est bien l’avenir du peuple juif !
 

La bouffe

 
Des photos jewpornfood dans tous les sens, entre la mloukhia et le pied de veau en gelée, on a le cœur au bord des lèvres dans les 2 groupes. Mais chez les Ashkés, tout est toujours pire. En contemplant ces photos de carpes farcies gélatineuses, tu comprends mieux pourquoi la gastronomie ashké est en perte de vitesse. Déjà, parce qu’un restau qui s’appelait l’International n’aurait pas pu survivre à la chute du Mur, mais aussi parce que depuis la Shoah, il y a moins de monde pour l’apprécier, et en… faim, parce qu’une pkaïla, ça a beaucoup plus de goût et de gueule que des boulettes de pain azyme qui surnagent dans une eau chaude jaunasse. Il n’y a qu’à bouffer à tous les râteliers et être inscrites, comme nous, aux deux groupes, pour s’en rendre compte immédiatement en comparant les photos.
 

L’art de la vanne

 
Autant la vanne ashké peut – quand elle n’est pas en yiddish – être compréhensible du commun des juifs, autant si tu n’as pas fait judéo-arabe 1ère langue, piger les blagues tunes, c’est dead. Exemple avec cette histoire de Sandrine Fellous (reproduite avec son accord) : « il y a Fritnai et Freha qui attendent l’arrivée du convoi funèbre pour l’enterrement de leur cousine Paulette, le convoi prend 2h de retard, enfin le convoi arrive, Fritnai soulagée, dit a Freha : « yai freha jete jete Colette ! ». Freha répond « chibahleye amra touil ! » (rires enregistrés). Niveau vannes chez les Ashkés, on comprend à peu près tout, mais c’est de l’humour pas marrant, surtout quand ce sont des blagues que racontent les parents ou les grands-parents. Exemple avec cette histoire rapportée par Fajga Rozenblatt sur le groupe des Ashkés (nom modifié pour préserver l’anonymat de ce membre) : « Chez nous, on a pas d’oiseaux en cage car quand les cosaques ont incendié le village, ils ont aidé a éteindre le feu en amenant de l’eau dans leurs petits becs » (rires enregistrés). Finalement, il y a des fossés culturels infranchissables. Les Ashkés ne comprendront jamais l’humour des Tunes, et les Tunes n’oseront jamais rire aux vannes des Ashkés, à chaque fois, ça leur donne l’impression d’être antisémites.
 

C’était le bon temps

 
Après un rapide tour du groupe des Ashkés, on se dit qu’il a été sponsorisé par feu Claude Lanzmann. Bon, forcément, les souvenirs de la Shoah y sont légion, ce qui plombe parfois un peu l’atmosphère. Heureusement, la légendaire gaieté ashkénaze reprend vite le dessus avec de bonnes vieilles histoires de pogroms (cf. plus haut paragraphe « L’art de la vanne »), surtout quand tu as le malheur de vouloir y poster une photo de ton misérable sapin de Noël. Côté tune, la nostalgie n’est pas en reste, on se souvient combien c’était chouette, le temps des colonies, oups pardon, du « protectorat » (ndt : « quand on vivait en harmonie complète avec nos voisins arabes »).
 
Le point de vue de Jackie : les Tunes écrivent en français avec beaucoup plus de fautes que les Ashkés, comme des Arabes en fait. Et après ils se plaignent que c’est nous les intellos.
Le point de vue de Sharon : les Ashkés trouvent les Tunes trop bruyants, mais si leur page Facebook était sonorisée, tu les entendrais hurler de douleur devant un tonneau de cornichons vide.

Le point de vue de Jewpop : les Algériens, ces snobs, ont un groupe qui compte… 41 membres (c’est pire que le Silencio pour y rentrer) et les Marocains rament péniblement avec un petit millier de membres. Nos migrants à nous.
 
Jackie Schwartz et Sharon Boutboul
 
NDLR : Sharon Boutboul nous signale qu’elle a été bloquée depuis par le modérateur du groupe « Tu sais que tu es Ashkénaze quand »…
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© photos : DR

Article publié le 26 mars 2014. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2016 Jewpop

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