Ellis Island : l’histoire du rêve américain, ce documentaire de Michael Prazan est diffusé mardi 11 mars sur Arte à 20h50. Arte, c’est la chaîne allemande qui, pour se démarquer des nazis, est plus jewish-friendly qu’Al Manar. Mais l’allemand, même a l’école, on m’a interdit d’en faire. Résultat, je ne la regarde jamais. Tout ce que je connais donc du rêve américain, ce sont les émissions de télé-réalité qui me l’ont appris.
Épreuve d’immunité.
Ellis Island est une île aux pieds de la statue de la liberté à New-York. Dès la fin du 19ème siècle, c’est la porte d’entrée des candidats a l’immigration aux États-Unis. Inutile de dire qu’il faut bien faire le tri, comme pour Koh-Lanta. Il y a donc des épreuves d’immunité. Calmos avec les problèmes de casherout, pas la peine de manger des limaces ou des araignées, en fait, il s’agit de tests médicaux à passer. Si tu n’as aucune maladie, ou que tu n’es pas enceinte (sic !), tu as le droit de rester. A Ellis Island, les services d’immigration ont fonctionné du 1er janvier 1892 au 12 novembre 1954. À partir des années 30, les Juifs ont été nombreux à vouloir aller vivre aux États-Unis. Il y en a eu au moins 600 000 qui ont ainsi tenter d’échapper aux persécutions. Ellis Island est construit sur le modèle d’une gare de triage. La différence avec Auschwitz, c’est qu’en cas d’échec à l’épreuve d’immunité pour les Juifs, on ne les tue pas sur place, mais on les renvoie en Europe pour que les cosaques ou les nazis s’en chargent, en fonction des époques.
Former des équipes.
En fait, les États-Unis, c’est comme Israël, ceux qui y vont se sentent de trop là où ils sont… Les irlandais sont trop catholiques pour les anglais, les siciliens trop pauvres pour les autres italiens, et les Juifs trop… exterminés ! Leur interdire certaines professions, y compris celle d’avocat, ne les dissuadent pas. Lower East Side, le quartier de New-York où tous se retrouvent, c’est l’équivalent du 9-3, en moins pro-palestinien. Dans cet environnement crade et hostile, il faut choisir la bonne équipe pour éviter de se faire éliminer ! Italiens et ashkénazes sont si proches qu’ils en deviennent sépharades. Meyer Lansky et Lucky Luciano créent le plus grand syndicat du crime. Ils s’en mettent plein les poches, et vident leurs bourses avec des starlettes. Sam Goldwyn se lance dans le cinéma et devient le point « G » de la MGM. Parmi les autres, anonymes, les irlandais, eux, deviennent les… antillais des américains ! Ils travaillent donc dans les administrations. Certains magasins ou bars installent même sur leurs devantures des panneaux « Interdit aux Noirs et… aux Irlandais ».
Secret Story
Tous embarqués dans la même galère, sur le même bateau, la plupart des candidats à l’immigration sont sapés comme des schnorrers… Le comble pour de futurs tailleurs ! Heureusement, les physios d’Ellis Island, ce ne sont pas ceux du Silencio. La sélection ne se fait pas sur le look. Alors au début, tout le monde déboule, dont 2 millions d’ashkénazes en provenance d’Europe centrale. Après, si t’es Juif, mieux vaut ne pas révéler ta véritable identité si tu ne veux pas te faire éliminer. « Naissance d’une nation », le film mythique de D.W. Griffith sorti en 1915, contribue à la renaissance du Ku Klux Klan, ce qui ne l’empêche pas d’être projeté a la Maison Blanche. L’after de « l’Immigration Act », c’est la crise de 29, puis la Seconde guerre mondiale : quotas, obligation d’avoir des passeports… les autorités américaines multiplient les freins pour empêcher l’immigration. Il s’agit d’éviter l’arrivée des catholiques, mais aussi bien sur des juifs, nombreux a vouloir fuir les persécutions nazies. Malgré ses relations, Sam Goldwyn le « G » de la MGM, n’arrive pas à faire venir les membres de sa famille pour les sauver. Les États-Unis refusent leur entrée sur le sol américain. Quand Ellis Island devient un centre de détention pour allemands, japonais et italiens, c’est pire que le loft ! Des juifs se retrouvent même nez-à-nez avec leurs ennemis en cellule, au prétexte qu’ils sont… allemands !
Aujourd’hui Ellis Island est un musée consacré a l’immigration aux États-Unis. Mais dans ce documentaire de Michael Prazan, il y a ce que vous n’y verrez pas. Le racisme, mais aussi la difficulté et le soulagement d’avoir échappé au pire… Voir l’histoire d’Ellis Island à travers ceux qui y sont passé permet d’éviter d’être manichéen… Il y a des gangsters juifs et italiens, une starlette gypsie, un maire philosémite, ça tape en matière de personnages récurrents, non ? Puisque je vous dis depuis le début qu’Arte fait dans la télé-réalité !
Jackie Schwartz
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© photos : Arte, DR
Article publié le 10 mars 2014. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2014 Jewpop