Lettre ouverte à Arthur

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La nouvelle est tombée sur BFM Business (oui, oui, cette chaîne existe vraiment) et depuis ça tourne en boucle sur tous les médias aussi vite que la vidéo du mec qui fait bouillir du coca dans les cours de récré. Toi depuis tu fais le mort, tes amis contactés par des journalistes médias (oui, oui, tu as aussi une carte de presse quand tu bosses à Télé Loisirs) passent irrémédiablement sous un tunnel, et Enora Malagré (oui, oui, la fille qui juge la télé tout en réalisant des audiences négatives) trouve que c’est «vraiment scandaleux !». Bref c’est un peu la merde, mais t’inquiètes pas mon gros loulou ça va passer… comme à chaque fois, et voilà pourquoi.
 
Tu vieillis bien : gras du bide, les cheveux frisés, les lunettes écailles des années 90 avec en prime le tee-shirt blanc sous la veste noire. Oui, c’est comme ça qu’on t’a découvert à la télé. Et à l’époque, ma mère avait un peu l’impression de découvrir son rejeton dans le poste. Qu’elle était fière ! «La fureur du samedi soir», «Rêve d’un soir», «120 minutes de bonheur» : elle ne ratait jamais une de tes émissions. Aujourd’hui, aminci, opéré des yeux, le sourire éclatant et les tablettes de chocolat bien rangées dans des chemises noires, ma mère continue de te kiffer en criant à tue-tête avec autant de mauvaise foi que Poutine expliquant que la Russie n’a rien contre les homosexuels, «il ne change pas ce Arthur, je l’adore !».
 
Tu prends des risques : alors que tu aurais pu te contenter de faire marcher le tiroir-caisse en produisant des sous-merdes télévisuelles, tu as décidé de tout plaquer et de monter sur scène pour faire marrer les gens et ça, sans casseroles de Gad Elmaleh et sans chauffeur de salle. Pour toi, habitué des grosses machines réalisées par Serge Kalfon, te retrouver dans la salle polyvalente de Marcq-en-Barœul, c’est un peu comme demander à ma mère de cuisiner sans huile ni coriandre. Et depuis, galvanisés par ton succès, d’autres se sont engouffrés dans la brèche. Cauet, Julien Courbet et bientôt Christophe Dechavanne.
 
Tu promeus la communauté : à l’heure où la communauté juive vit dans une sorte de sinistrose économico-identitaire, tu redonnes des couleurs et de la voix au juif séfarade exubérant qui sommeille en chacun de nous. Alors que certains sont obligés d’enlever leur kippa pour faire le trajet qui sépare la maison de la synagogue, toi sur TF1 en prime time, tu alignes sans sourciller en premier partie Dany Boon, Ary Abittan, Patrick Bruel, Dany Brillant, Géraldine Nakache, Audrey Dana et Michael Youn. Bref, un vendredi soir, tu réussis à faire mieux que la petite synagogue qui vivote coincée entre deux cités dans le 9-3, tu as réuni minyan. Elle, elle attend encore.
 
Tu as réussi là où mes frères ont échoué : eux ont fantasmé sur des blondes punaisées sur les murs de leurs chambres sans jamais assumer d’en présenter une à ma mère. Toi tu en as épousé une.
 
Et puis, même si c’est pour des raisons fiscales, quand on sait que Morandini est obligé de fermer les commentaires des articles te concernant à causes des immondices antisémites qu’ils génèrent, je me dis que s’installer en Belgique deux semaines après la tuerie du musée juif de Bruxelles, ça a du panache.
 
The SefWoman
Ma philosophie se situe entre « A Kippour tout le monde pardonne, sauf moi » (Raymond Bettoun) et « Dieu n’existe pas, mais nous sommes son peuple » (Woody Allen)
 

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Article publié le 6 juin 2014. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2014 Jewpop

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