Si à 25 ans tu n'as pas fait le SNEJ, c'est que tu as raté ta vie

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Octobre, la rentrée, l’angoisse des feuilles mortes. Passé les fêtes de Tichri qui monopolisent ma famille comme un inventaire dans un grand magasin,  je n’avais pas encore choisi mes nouvelles résolutions (arrêter le mojito ? commencer à fumer ? manger des légumes ?) – et mes nouvelles occupations de cette nouvelle année.

 

Théâtre ? J’avais mal au crâne en entendant les propositions de pièces, toutes en concurrence avec La Rafle dans la catégorie Kleenex. Un cours de langue ? J’avais déposé la méthode Assimil Hébreu au pied de mon lit en 2004. Je la regarde parfois langoureusement avant de me coucher, et me remémore les 4 mots que j’apprends chaque année en Israël. Un succès manifeste. À ce moment de ma réflexion, je plonge avec délectation dans la bitu…, je veux dire je prends un verre de brainstorming avec des potes à Montorg et là, un copain me parle d’un séminaire d’études juives pour «jeunes», à l’Alliance Israélite Universelle.

 

Comprendre, un séminaire où les cours ne sont pas peuplés de fringants jeune retraités ayant 3 fois mon âge, où il n’y a donc pas de hazkara toutes les deux semaines, et où celui qui fait le cours n’a aucune excuse s’il endort son auditoire. Un cours sur le judaïsme qui n’est pas plein de Shirley, Kimberley et Marlon qui viennent d’avoir 18 ans et qui sont – enfin ! – prêts à se marier. Un cours où il n’y a pas de barbus qui m’expliquent, à moi, ce qu’est, au choix, un bon couple/un bon mariage, ou que la discrétion est une vertu cardinale de la Femme Juive (thème au choix, suivant la semaine, de toute façon on alterne la semaine d’après). J’ai toujours préféré être une mauvaise juive : c’est un point non négociable pour faire une bonne techouva. Ma cousine de 35 ans depuis maintenant 8 ans me demande si c’est mixte… Hell yeah !! C’est beaucoup plus drôle. Ma mère, elle, a vu un rabbin miraculeux qui lui a dit que ça allait m’empêcher de trouver un mari… Pas grave, je l’ai prévenu que de toute façon, vu l’amour immodéré de mon frère pour les garçons, je pense que le premier mariage de la famille ne sera pas le mien (merci Christiane Taubira).

 

Bref, je me suis inscrite au SNEJ, la Section Normale des Etudes Juives. Ma vie s’est transformée d’un seul coup et s’est trouvée remplie deux soirs par semaine. Il faudrait souffrir lundi et jeudi, pour refuser toute invitation, tout concert, toute soirée ou afterwork. Mes amis ont commencé à trouver mon comportement suspect, et mon langage incompréhensible. Etais-je entrée dans une secte ? Pourquoi ne pouvaient-ils venir à ces cours ? Le Pschat est-il un champignon hallucinogène inconnu ? Dubnov est-il le nom d’une vodka redoutable ? Le Guide des Egarés est-il une nouvelle application de GPS ? D’où venait mon amour immodéré pour Belle du Seigneur, alors que je n’avais même pas vu le film? Mes amies s’inquiètent.

 

Je faisais en effet prospérer d’autres fréquentations. L’avantage, au Snej, c’est qu’il y a de tout pour faire un monde (juif). Du religieux, normalien traditionaliste, qui venait chercher autre chose dans ces cours que le «baroukh hachem», «beezrat hachem» du Talmud Torah, et éventuellement des profs qui ne fassent pas quatorze fautes de grammaire en deux phrases. Le libéral, biberonné à Dolto et élevé en quasi communauté hippie, qui pense que Dieu ne doit pas exister, mais que s’y intéresser peut s’avérer utile dans certains dîners mondains. Le séfarade qui parle avec les mains du renouveau du judaïsme par le biais des djerbiens, à l’ashkénaze, petit fils d’enfants cachés, que l’on a forcé à prendre allemand 1ère langue au cas ou «ils» reviendraient et qui utilise les siennes, de mains, pour se boucher les oreilles.

 

Il y avait aussi le start-upper bon chic bon genre, trente idées de business à la seconde qui se désole que Rachi n’ait pas pensé à breveter ses commentaires. Il y avait l’universitaire bon teint, mais pas très chic, docteur à bac + 16 sans avoir fait médecine (une anomalie manifeste) et qui devise en alexandrins sur Maïmonide – en version originale arabe (seconde anomalie, cela va sans dire). Et puis y’a Thibaut, ancien étudiant, désormais responsable du programme, et son éternel costume trois pièces, qui, entre deux cours, prépare les programmes des week-ends d’intégration façon école de commerce à Casablanca, Prague ou Rome.

Il y avait aussi ce garçon au deuxième rang, l’air endormi, avec qui j’ai passé un peu plus que mes lundis et jeudis. Mais bon, ce n’est pas Rachel et les garçons non plus, je ne vais quand même pas vous raconter comment j’ai pécho au SNEJ.
 
Bonnie Cohen & Clyde Soussan
 
Toutes les infos sur le programme et les enseignants, à découvrir sur le site du SNEJ.
Pour répondre au mieux au rythme des étudiants du SNEJ (essentiellement jeunes actifs), le SNEJ modifie ses horaires : accueil / collation de 18h30 à 19h30, début des cours à 19h30 ( jusque 22h30).
 
© photos : DR
Article publié le 30 septembre 2014, tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2014 Jewpop
 
 

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