Avec Arab Jazz (Editions Viviane Hamy), Karim Miské signe un premier livre qui le place d’emblée dans le cercle très fermé des grands auteurs de romans noirs. La maison d’édition de Dominique Sylvain et Fred Vargas ne s’y est pas trompée. Jewpop vous présente le polar de l’été.
La 4ème de couverture : A Paris, le 19e est un arrondissement des plus cosmopolite : sushi kasher, restaurant turc, coiffeur juif, libraire arménien… Seul Ahmed Taroudant demeure à l’écart : prisonnier de son histoire, rêveur, lecteur fou de polars… Jusqu’à ce qu’il découvre le corps affreusement mutilé de sa voisine et amie, Laura Vignola, attaché au-dessus de son balcon. Il comprend vite qu’il constitue le coupable idéal. L’horreur de la situation l’extirpe de sa léthargie, et il va collaborer avec les lieutenants de la Crim’ qui mènent l’enquête, la flamboyante Rachel Kupferstein et le Breton Jean Hamelot. Les imaginations s’enflamment. Mais, ensemble, ils détiennent les éléments pour décrypter cette mort. Un meurtre symbolique exécuté par un fou de Dieu loubavitch ou salafiste ? Qu’en est-il du père de Laura, Témoin de Jéhovah, dont l’influence s’étend jusqu’à New York ? Quel rôle joue le Godzwill, cette si jolie pastille qui traverse les frontières ?
Karim Miské connaît ses classiques, et son premier roman ne manque pas de références au genre, le titre du livre faisant écho au « White Jazz » de James Ellroy, autrement dit « un coup tordu monté par des blancs ». Mais c’est le cadre de son intrigue qui dénote par son originalité : ici, ce ne sont pas « Des souris et des hommes », mais des religions et des hommes, entremêlés dans un 19ème arrondissement de Paris où salafistes, loubavitches, Témoins de Jehovah et flics véreux se croisent et se côtoient, avec comme credo « Dieu pardonne, moi pas ». D’où la citation du rappeur Booba en exergue d’Arab Jazz : “Tu parleras moins avec un Glock dans la bouche”.
Dès les premières pages, on s’attache immédiatement aux personnages principaux du roman, à commencer par Ahmed Taroudant, le veilleur de nuit solitaire en arrêt maladie depuis cinq ans, dépressif chronique passant ses journées à lire des polars achetés au kilo chez Monsieur Paul, le libraire du coin. Et puis son improbable duo de flics cinéphiles, Rachel Kupferstein et Jean Hamelot, qu’on a très envie de retrouver dans de nouvelles aventures en tournant la dernière page d’Arab Jazz.
Au cours d’une intrigue palpitante sur fond de trafic de drogue, Karim Miské, réalisateur de documentaires (on lui doit notamment Musulmans de France), entraîne le lecteur dans ce quartier de Paris qu’il décrit à merveille, le nourrissant de parfums et de musiques, tout en évoquant avec rigueur et justesse les phénomènes d’intolérance inhérents aux fondamentalismes religieux, et les manipulations qui peuvent en découler. Le tout dans un style particulièrement enlevé, où poésie, humour et éclairs de violence se mêlent adroitement. Arab Jazz se dévore comme un excellent – au choix – falafel, kebab ou jambon-beurre.
Alain Granat
Karim Miské présente la genèse d’Arab Jazz :