Pourquoi l’oleh hadach n’est pas toujours le meilleur ami du juif de France

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Il a choisi de quitter la France pour s’installer en Israël. Quelles que soient ses motivations, l’oleh hadach (nouvel immigrant) est en Terre Sainte un homme comblé. Il revient quand même en France pour le dentiste et les soldes. Des rechutes auxquelles tu assistes impuissante.

 

Il vient 4 jours, t’as l’impression qu’il reste 4 mois : il débarque comme une furie, bousculant ton quotidien un peu comme la tornade qui a balayé le Mexique. Les mauvaises langues évoqueront la délicatesse des soldats de Tsahal faisant une incursion dans la bande de Gaza. « Quoi tu l’accompagnes pas au Printemps Homme ? Vas-y prends ta journée ! ». Pour être joint par toutes ses connaissances parisiennes, il a mis ton numéro de portable sur son mur Facebook où il a 3467 amis.  Il te répète qu’il a envie de passer du temps avec toi. Tu te rends compte qu’il a surtout besoin de ta voiture. A chaque fois que tu ouvres la bouche, il dit « mais c’est tellement français ce que tu dis », cela ne l’empêchera pas de te demander de lui faire un certificat d’hébergement pour renouveler  sa carte d’identité.

 

Il a oublié la France : il est parti il y a 3 ans. Mais en fait, à bien y réfléchir, t’as l’impression qu’il a quitté l’Hexagone quand il avait 3 ans. Il ne comprend pas pourquoi, quand il dit « bonjour » en rentrant dans une rame de métro,  personne ne lui répond. En voyant le prix du shwarma pita à l’As du falafel, il est aussi choqué qu’un militant des droits de l’homme à Lampedusa. Il se lève à 5h30 en te traitant de grosse feignasse. Quand il apprend que les boutiques de la rue Marbeuf n’ouvrent pas avant 10h30, il dit « Mais je comprends pourquoi le pays est en crise. 10h30, c’est le milieu de la journée en Israël ». Au stand Sandro des Galeries Lafayettes, il essaie de marchander comme au souk Hacarmel.

 

Il ne sait pas comment tu fais pour continuer à vivre ici : à l’écouter, Paris, c’est pour les juifs de France comme Varsovie à la fin des années 30 pour les juifs polonais. Il s’étonne qu’on puisse encore manger casher. Si une pizzeria casher a fermé, c’est évidemment à cause de l’antisémitisme… Bon, et puis il trouve qu’il y a vraiment trop d’Arabes. Il te conseille de voter Marine Le Pen pour «faire péter le système». Quand tu lui fais remarquer que vous vous êtes rencontrés en 1998 à une manif contre le FN, il te dit  « C’était son père, c’était pas elle ». Tu tires un trait sur votre amitié quand, en voyant Florian Philippot, il dit : « il est bien ce type, c’est qui ? ». Il loue sans cesse les différentes nationalités qui se côtoient en Israël. «Tu te rends compte, dans mon immeuble, ma voisine du dessous est brésilienne. Elle est mariée avec un juif ukrainien. Au-dessus, y a une veille dame qui est née en Pologne. Ses petits enfants sont yéménites ». Ce à quoi je n’ai trouvé qu’à répondre «Je n’avais pas remarqué ton amour du monde version Benetton quand t’as pas répondu au bonjour de ma concierge portugaise».

 

Il essaie de te convaincre de faire ton alyah : toute l’année, chaque matin, il te maile une capture d’écran de l’appli météo du iPhone. Quand il est à Paris, il met un bonnet alors qu’il fait 16 degrés, et à l’intérieur, il fout les radiateurs à fond. Pour te tenter, il te promet « un lien direct avec Dieu ». Comme ça t’émeut autant que la couverture 4g de Bouygues Télécom, il décide de frapper un grand coup : « ton mec est en Belgique, tes parents te font chier, tu végètes dans ton boulot, sérieux, tu fais quoi ici ? ». Quand tu lui fais remarquer que tu as la garde alternée de ton fils, il élude avec un geste de la main : « Tu prends deux allers-simples, on verra sur place. Je connais un bon avocat sur Tel-Aviv, il ne te prendra pas cher. Grâce a lui j’ai récupéré mon permis. Et puis, y a pas de convention d’extradition entre Israël et la France. Arrête de te chercher des fausses excuses ».

Sur le chemin de l’aéroport pour son vol de retour, il répétera en boucle : « Je suis tellement content de rentrer chez moi ! », tu te mordras les lèvres pour ne pas lui répondre « tout pareil ».  Coup de grâce : après une dernière diatribe contre Hollande, les islamistes et la pression fiscale, tout en cherchant son billet, il te montrera sa dernière trouvaille : une pochette en cuir a double zip : « Recto, le passeport français pour pas me taper la queue à Charles De Gaulle, verso, mon passeport israélien pour pas me taper la queue à Ben Gourion. C’est malin, hein ? ».
 
The SefWoman
Ma philosophie se situe entre « A Kippour tout le monde pardonne, sauf moi » (Raymond Bettoun) et « Dieu n’existe pas, mais nous sommes son peuple » (Woody Allen)
 

 
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Article publié le 5 novembre 2013. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2013 Jewpop
 
 

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