Sois érotique en keffieh

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Le keffieh, accessoire irrémédiablement associé aux Palestiniens, n’a rien d’érotique en soi. De prime abord. Il est pourtant au cœur d’une mini-polémique qui pourrait prêter à rire, si elle n’était révélatrice des réactions épidermiques que le détournement de symbole peut susciter de part et d’autre sur le sujet. C’est dans la rubrique Les Observateurs du site France 24, qu’un article publié la semaine dernière a mis en lumière le « scandale » provoqué par l’actrice et créatrice de mode israélienne Dorit Baror avec sa collection printemps déclinée autour du keffieh.
 
L’histoire débute lorsqu’une photographe jordanienne résidant à Jérusalem, Tanya Habjouqa, en promenade à Tel-Aviv, passe devant la vitrine d’une boutique exposant les modèles de Dorit Baror. Choquée par ces vêtements, elle publie sur son compte Facebook une photo accompagnée d’un post, abondamment partagé et commenté sur le réseau social, exprimant son dégoût de l’appropria-sion de l’accessoire traditionnel symbole de la lutte des Palestiniens, par une créatrice israélienne.
 

Dorit-Baror-Tanya-Habjouqa-Keffieh-JewPop

 
Quelques jours plus tard, c’est Mohammed Matter, de l’ONG palestinienne Gaza Youth Cultural Center, qui s’émeut sur Facebook d’une « érotisation » du vêtement, qui rabaisserait ainsi la lutte du peuple palestinien à une banale histoire de cul. On n’ose imaginer les réactions si l’actrice porno israélienne Leyla Sin avait eu l’idée saugrenue de tourner, en uniforme du Hamas ou simplement accessoirisée d’un keffieh autour du cou, une pochade libidineuse intitulée « Ramone mon tunnel humide avec ton gros missile ».
 

Capture d’écMohammed-Matter-keffieh-Dorit-Baror-JewPop

 
On peut néanmoins comprendre que des Palestiniens soient choqués par ces créations produites par une israélienne, au même titre que des juifs se sont émus de la diffusion des pièces Zara et H&M pouvant évoquer des tenues de déportés, qui ont fait polémique ces derniers mois avant d’être retirées de la vente. À la différence près, toutefois, que le keffieh n’est pas l’apanage des Palestiniens – même s’il reste associé à leur image politique – alors que nous avons hélas eu droit à l’exclusivité de l’étoile jaune et du pyjama rayé. Je ne porte jamais de pyjama rayé pour dormir. Et de toutes façons, je ne porte jamais de pyjama pour dormir. Encore moins de keffieh, d’ailleurs. Vous en connaissez beaucoup, vous – à part les militantes du BDS et du PIR – des meufs qui portent encore un keffieh ? Pourquoi pas des Crocs™ tant que vous y êtes. Il n’y a que le personnel hospitalier et les Israéliens pour porter encore des Crocs, preuve du mauvais goût absolu de ces derniers en matière de mode.
 

dorit-baror-keffieh-JewPop

 
La vraie question qui se pose est bien celle de la cible visée par la créatrice. Pas sûr que les  israéliennes aient envie de jouer les fashionistarafat avec des pièces qui frisent le kitsch teuton, façon Heidi à la Bierfest. Je viens en fait de comprendre l’intention de la créatrice. Elle a voulu mixer l’ultime symbole palestinien avec un twist bavarois qui n’est pas sans évoquer l’idéologie nazie. On voit bien, finalement, ce qui se cache derrière la collec-sion de Dorit Baror.
 
Sharon Boutboul
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© photos : Dorit Baror / Tanya Habjouqa / DR

Article publié le 7 février 2016. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2016 Jewpop

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