Stanley Donen, Swingin' in the Rain

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Disparu jeudi à l’âge de 94 ans, Stanley Donen était le dernier réalisateur de l’âge d’or d’Hollywood. De Chantons sous la pluie à Drôle de frimousse en passant par Charades, son art a magnifié la comédie musicale et le cinéma américain. Retour sur la prodigieuse carrière d’un enfant juif de Caroline du Sud.

Photo représentant Stanley Doene et Liz Taylor dans les années cinquante Jewpop

Elizabeth Taylor et Stanley Donen

Stanley Donen naît  le 13 avril 1924 à Columbia, dans l’État de Caroline du Sud, au sein d’une famille juive. Son père, Mordechai Moses Donen, est gérant d’un magasin de vêtements pour femmes, et sa mère, Helen Cohen, est fille d’un bijoutier. Le racisme et l’antisémitisme qui faisaient bon ménage dans cette petite ville du sud des États-Unis a marqué son enfance, et explique sans doute le parcours de Stanley Donen, qui devint athée adolescent et a toujours décrit sa jeunesse comme malheureuse. Harcelé à l’école parce qu’il est juif, l’enfant se réfugie au cinéma où il passe ses journées, découvrant dans les salles obscures un monde bienveillant et idéal.

Audrey Hepburn et Stanley Donen sur le tournage de « Funny Face » à Paris (1957)

Il découvre l’univers des musicals grâce à Fred Astaire, qu’il admire dans Flying down to Rio (1933). «J’avais neuf ans et cela a changé ma vie. Tout avait l’air si merveilleux et mon existence, elle, ne l’était pas. […] J’ai dû voir le film trente ou quarante fois. J’étais comme transporté dans un monde fantastique où tout n’était que joie, bonheur, vie facile et confortable. Un sentiment de bien-être m’emplissait.»

Photo représentant Audrey Hebpurn et Stanley Donene sur le tournage de Fuuny Face à Paris Jewpop

Gene Kelly et Stanley Donen sur le tournage de « Chantons sous la pluie » (1952)

Le père de Stanley encourage la passion de son fils pour la danse et les comédies musicales, lui offre des cours de danse et l’emmène lors de ses voyages d’affaires à New York, profitant de ces occasions pour voir les shows qui se produisent à Broadway. À l’âge de 16 ans, Stanley Donen quitte le collège et avec l’aide financière de son père, débarque à New York, trouvant immédiatement un rôle de chorus boy dans Pal Joey, un show mis en scène par George Abbott et dont le danseur vedette est Gene Kelly, qui le prend sous son aile et fait de lui son assistant pour son show Best Foot Forward. Les deux se complètent à merveille. Kelly, 12 ans plus âgé que Donen, a déjà cette aura et ce charme qui feront son succès, tandis que Stanley Donen, plus discret, préfère travailler dans l’ombre. La pièce, qui fait le plein, est remarquée par l’un des plus célèbres producteurs de comédies musicales de la MGM, Arthur Freed, que l’on qualifierait aujourd’hui d’incubateur tant ses équipes révolutionneront l’art de la comédie musicale hollywoodienne

Dès 1943, Donen et Kelly forment un inséparable duo, qui va marquer les productions hollywoodiennes. La Reine de Broadway (Cover Girl, 1944) avec Rita Hayworth, Escale à Hollywood (Anchors Aweigh, 1945) de George Sidney, mais surtout l’extraordinaire première réalisation du tandem Donen-Kelly, Un jour à New York (On the town, 1949), figurant le mythique trio Gene Kelly, Frank Sinatra et Jules Munshin, porté par la partition de Leonard Bernstein et le scénario d’un autre tandem de choc, Betty Comden et Adolph Green, qui signeront quelques années plus tard celui de Singin’ in the Rain.

S’ensuivront le délicieux Mariage Royal (Royal Wedding, 1951), avec en vedette l’idole de Gene Kelly, Fred Astaire, puis Chantons sous la pluie (Singin’ in the Rain, 1952), subtile et hilarante chronique des débuts du cinéma parlant, et sans aucun doute la plus belle réussite du duo Donen-Kelly. En juin 2012, le réalisateur était à Paris, invité au Forum des Images pour parler de son travail face à une salle comble. Alors âgé de 88 ans, Donen avait charmé ses fans par son humour, sa maîtrise de la langue française et ses anecdotes, en particulier sur la séquence mythique de Singin’ in the Rain qui nécessita plusieurs jours de tournage et des tonnes d’eau pour figurer la pluie, au point que Donen souligna qu’une pénurie frappa alors les propriétaires de piscines à Hollywood !

Stanley Donen, Cary Grant et Ingrid Bergman sur le tournage de « Indiscret » (1958)

Comédies romantiques, comme Indiscret (1958) avec Ingrid Bergman et Cary Grant, comédies d’espionnage, telles Charade (1963), Arabesque (1966), où excellent Audrey Hepburn et Sophia Loren sur des partitions du génial Henry Mancini, les œuvres suivantes de Stanley Donen marquent son goût pour l’élégance, le sens de la comédie brillante, tout comme dans Ailleurs l’herbe est plus verte (The Grass is Greener, 1960), un classique triangle amoureux où Cary Grant et Robert Mitchum tentent de conquérir Deborah Kerr. Mais c’est avec Voyage à deux (Two for the Road, 1967), où Audrey Hepburn et Albert Finney incarnent un couple en crise, que le réalisateur innove avec audace dans une comédie mélancolique à la construction particulièrement inventive.

Photo représentant Stanley Donene et son épouse Yvette Mimieux au festival de Deauville en 1979 Jewpop

Stanley Donen et sa (quatrième) épouse l’actrice Yvette Mimieux au festival de Deauville en 1979

Lors de sa venue à Paris en 2012, Donen, dont la carrière était depuis longtemps derrière lui, rêvait encore et toujours de réaliser un nouveau film, déclarant avoir dans ses cartons des scénarii qui mériteraient d’être financés… Il restera à jamais associé à ce «ti dou di dou» que le public fredonne depuis 67 ans lorsque les trottoirs sont inondés par la pluie, et que l’on se prend pour Gene Kelly.

Alain Granat

© photos : DR

Article publié le 25 février 2019. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2019 Jewpop

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