Turban sur la tête, à cheval sur un âne, entouré de moutons à la recherche de pâturage, le bédouin passe sa journée. Tout autour, c’est le désert, le silence. Le silence ?
Le village Wadi Nam, 15 000 habitants, se trouve en bordure de l’autoroute Tel Aviv-Eilat. Ici, on aurait du mal à confondre les lieux avec ceux d’une carte postale. Village ? Ville ? Campement ou bidonville ? La distinction est difficile.
“Peuple nomade et polygame, leur taux démographique est parmi les plus élevés d’Israël”
Les Bédouins forment un peuple à part en Israël. 55% du territoire israélien est couvert par le désert où 1 million d’habitants vivent. Parmi eux, 125 000 sont des Bédouins. 56 de leurs villages ne sont pas encore reconnus par le gouvernement. Mais le nombre officiel de camps à reconnaitre s’élève à 36. Tout n’est qu’une question de définition. A Wadi Nam par exemple, le centre du village est reconnu. Les Bédouins sont un peuple très attachés à leurs traditions. Peuple nomade et polygame, leur taux démographique est parmi les plus élevés du pays. En conséquence, leurs besoins en eau ne cessent d’augmenter. Dès lors, les difficultés apparaissent. Puisqu’il s’agit de campements illégaux, l’alimentation en eau et en électricité n’est pas assurée. Aucune route construite par le gouvernement ne mène au village tant que celui-ci ne sera pas reconnu. Cela est étroitement lié au taux de mortalité dans le village. En cas d’urgence, les ambulances n’ont pas un accès facile aux personnes menacées.
“Depuis l’ouverture de ce complexe, le taux de cancer dans le village a augmenté de 30%”
Comment concilier citoyenneté et mode de vie traditionnel ? En tant que citoyens israéliens, les Bédouins ont des droits : approvisionnements en eau et en énergie. Pourtant, c’est en désaccord avec leur mode de vie nomade. Pour les inciter à quitter les campements illégaux où ils logent, le gouvernement a initié une stratégie particulière. En 2003, une station électrique a été construite en bordure du village. Elle est immense, et permet d’alimenter Beer Sheva en électricité. Les Bédouins n’en reçoivent pas une once. Comme cela ne suffisait pas à les déloger, un complexe d’entreprises chimiques a aussi été construit en périphérie du village. 24 entreprises sont réunies ici, ce qui a pour effet de rendre les terres alentours infertiles et dangereuses car gorgées de composants chimiques. Depuis l’ouverture de ce complexe, le taux de cancer dans le village a augmenté de 30%.
Les Bédouins parviennent cependant à trouver quelques solutions pour subsister. A Wadi Nam, les villageois ont économisé et investi dans les panneaux solaires. Ils peuvent ainsi subvenir à leurs besoins en électricité. Les adolescents partent étudier à l’université Ben Gourion à Beer Sheva, rêvent de culture occidentale et d’émancipation, ont des iPhones, apprennent l’anglais, tout en souhaitant garder leurs traditions. La polygamie comme la préparation du thé et du café.
Daphné Tapia
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© photos : Daphné Tapia
Article publié le 13 avril 2018. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2018 Jewpop