"Un juif en cavale", fin de saga pour Sagalovitsch

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« C’est un plaisir de raconter les douleurs passées », affirme un vieux dicton juif. La lecture d’Un juif en cavale (Actes Sud) de Laurent Sagalovitsch, procure ce plaisir unique de rire aux larmes et de sentir sa gorge se nouer, à travers un roman initiatique dont nous sommes tous un peu le héros.

 
Dans ce dernier et troisième volet de la trilogie débutée par Loin de quoi ? en 2005, Laurent Sagalovitsch entraîne son double-errant, Simon, et sa délicieuse et fidèle compagne batave Monika, au coeur de la nouvelle Sodome. Un Tel-Aviv loin des clichés bobo-Bauhaus, avec « ses avenues sordides de laideur, saturées d’immeubles déglingués », où Simon Sagalovitsch va enfin découvrir les siens.
 
Et se retrouver, Terre promise oblige, entraîneur d’une équipe de foot baptisée « Association sportive des Français apatrides déportés en Israël » ! Du pur Sagalovitsch, dont la passion inébranlable pour le beau jeu, celui du Saint-Étienne mythique, se décline en pages hilarantes, telles ce descriptif d’une feuille de match improbable où se côtoient « les frères Schoukroun, David et Zvi, deux faux jumeaux spécialisés dans les voyages organisés à dos de chameau en territoires occupés » et « David Benzaken, employé de mairie en charge du ravalement des immeubles municipaux, autrement dit payé à rien foutre ».
 
L’art de Laurent Sagalovitsch, c’est un style brillant, alternant dialogues construits au cordeau, monologues enfiévrés et descriptions au souffle lyrique, comme ce « pèlerinage » au Mur des Lamentations, sans doute parmi les plus belles pages du roman. On y retrouve bien sûr les interrogations sur la judéité qui constituent le creuset de la trilogie, en pensant immanquablement à ce trait de Woody Allen, «Dieu n’existe pas, mais nous sommes son peuple».
 
En lisant « Un juif en cavale », on éprouve le sentiment jouissif de naviguer d’un compte-rendu de match de Division d’Honneur dans l’Équipe rédigé par un journaliste sous acides, à un scénario digne d’un film des frères Coen, mis en scène par le roi du mélo hollywoodien Douglas Sirk. Sagalovitsch possède ce talent rare de faire passer son lecteur de l’éclat de rire à l’émotion sans pathos, tout en douceur. Une douceur au goût parfois amer, comme une orange de Jaffa. Si Jules Vernes n’eut été un fieffé antisémite, l’auteur aurait bien pu intituler son nouveau roman « Les tribulations d’un Sagalovitsch en Israël ». Car dans tribulations, il y a tribu.
 
Alain Granat
 
Un Juif en cavale, Actes Sud, 272 p., 19 € 80
Le blog de Laurent Sagalovitsch
La page Facebook « Un juif en cavale »
L’auteur sera en dédicace mercredi 27 mars à la Librairie Folies d’Encre (à partir de 18h30), 9 Avenue de la Résistance, 93100 Montreuil, et au MAHJ jeudi 28 mars (19h30) pour une rencontre avec le journaliste Pierre-Louis Basse autour de son roman.

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