Photo de Camille Nahum Jewpop

Camille Nahum : l'interview ni weed ni non

12 minutes de lecture

Réalisatrice, scénariste, comédienne, Camille Nahum s’apprête à tourner son premier film, Jokos, inspiré d’une “histoire vécue”, où deal de weed et rencontres improbables se télescopent un soir de Noël. Jewpop a rencontré cette créatrice prolifique, qui se dévoile avec amour et humour.

Camille Nahum, photo de tournage du court-métrage Le bureau des couilles perdues Jewpop

Camille Nahum sur le tournage du court-métrage Le bureau des couilles perdues © Nicolas Cachelin

“Une féministe équilibrée”

Jewpop : Camille, nous t’avons découverte avec le court-métrage “Le bureau des couilles perdues”, une réjouissante parabole féministe. Tu es quelle genre de féministe, en fait ?
Camille Nahum : Je me définirais comme une féministe “équilibrée”. Dans “Le bureau…”, je tape aussi bien sur le manque de courage des hommes que sur ces femmes qui les “émasculent”. Je prône un féminisme humaniste visant à la réconciliation des sexes et une meilleure répartition des couilles.

Jewpop : À propos d’amour, outre celui que tu portes au cinéma et à l’écriture, tu es une passionnée de gastronomie. Tu as réalisé pour M6 le programme Astuces de chef, créé et produit 3 saisons des Secrets des grands chefs et réalisé les portraits des candidats de Top Chef… Comment s’est passée cette expérience en télé ?
C.N. : Une expérience exceptionnelle et unique, côté rencontres et création, compliquée en interne, côté prod télé. Les chef(e)s sont des personnalités extraordinaires, certains sont devenus des amis, et je suis fière d’avoir modestement contribué à promouvoir leur travail. Je viens d’ailleurs de terminer d’écrire un projet de film qui parle de la haute gastronomie et de la pression des étoiles. Du côté des diffuseurs, c’est une autre histoire. Très peu valorisées et plutôt enfoncées, c’est un monde sans pitié où personne ne te fait de cadeaux et où tu es mis à l’épreuve en permanence, alors que tu leur apportes, c’est le cas de le dire, tout sur un plateau ! Le monde de la télé, c’est vraiment comme Dallas, impitoyable mais sans le glamour et les dollars…

Photo de Camille Nahum

Photo © Nicolas Cachelin

“Boulimique côté écriture, passion gastronomie oblige !”

Jewpop : Qu’est-ce qui fait courir Camille Nahum ? Nous avons regardé ton profil sur le site de ton agent, c’est vertigineux ! Tu enchaînes un tel nombre de projets qu’on t’imagine dormir 4h par nuit.
C.N. : C’est vrai, je suis légèrement boulimique côté écriture, passion gastronomie oblige ! Ces derniers temps, je me suis dit que c’était le bon moment, que j’avais toutes les cartes en main pour développer toutes les histoires auxquelles je pensais et auxquelles je tiens. Après le “Bureau…”, j’ai réalisé un autre court métrage, 10 ans de retard, sur les rapports de couple (NDLR : à voir absolument, à la fois drôle, tendre et extrêmement bien vu), dans lequel j’ai également joué, écrit 2 séries, 2 longs-métrages… Et tous ces projets sont signés ! Je suis dans une sorte de cercle vertueux, avec une âme de vrp de l’écriture ! En fait, quand une prod me fait confiance, j’arrive avec ma petite mallette, comme si je plaçais des encyclopédies en porte-à-porte. “Vous avez aimé mon projet de film ? Bougez pas, j’ai un autre truc qui devrait aussi vous plaire, c’est une série !”

Jewpop : On a finement tiré cette interview “ni weed ni non”, vu le sujet de ton premier long-métrage que tu t’apprêtes à tourner cet hiver. Il paraît que le casting déchire. Tu peux nous dire qui sera au générique ?
C.N. : J’ai la chance d’avoir deux immenses talents montants : Tiphaine Daviot (Une belle histoire/France 2 – Marianne/Netflix) et Soufiane Guerrab (PatientsLa vie scolaire – 10%…), deux acteurs prodigieux dont nous n’avons pas fini d’entendre parler. Il y aura également toute une galerie de rôles secondaires haut en couleurs, mais ça, c’est en cours et confidentiel pour le moment. En tout cas, je peux vous dire que le casting devrait détonner et que je suis sur un petit nuage !

Jewpop : Un nuage de weed ?
C.N. : Weed !

Photo de Camille Nahum Jewpop

Photo © Manuel Duran

“Je revendique le droit à l’adultère”

Jewpop : Joann Sfar, que tu connais bien pour avoir adapté au théâtre son “Chat du rabbin“, s’est récemment exprimé sur l’affaire Benjamin Griveaux, expliquant que ce dernier aurait du assumer ses “dick pics“ et dire “ok, j’ai fait une connerie, on peut passer aux choses sérieuses maintenant ?”. C’est très “couilles perdues” selon toi ?
C.N. : Absolument ! Moi j’aurais rêvé que le mec prenne la parole et dise : « Oui c’est ma bite et alors ? Vous voulez voir mes couilles ? » Je trouve que sa réaction manque sacrément de courage, surtout pour un politique. Mais surtout, c’est extrêmement effrayant, les réactions que cela a suscité, notamment sur la gravité de tromper sa femme. Le mec a pas été malin, ça c’est clair, et il a mal choisi son timing, mais je revendique le droit à l’adultère. Il me semble que dans notre pays c’est encore légal, mais peut-être que je me trompe… Ça révèle le climat totalitaire qui est en train de se mettre en place en France, doucement mais sûrement, et que je crains de plus en plus.

Jewpop : On ne pouvait pas éviter le sujet César. Tu es plutôt “On se lève et on se casse”, ou “On se lève tous pour Polanski” ?
C.N. : Je ne me lève ni pour me casser, ni pour défendre Polanski (dont le film est remarquable, au passage, puisqu’il faut aussi le dire), mais je refuse de marcher aux côtés de femmes qui revendiquent l’éradication du mâle. Je suis clairement une féministe affirmée et assumée, mais quand je vois que dans une manifestation on appelle à couper la bite des hommes à la guillotine, je ne me reconnais pas dans ce combat. C’est drôle parce qu’on avait réalisé un sketch avec ma sœur, il y a une dizaine d’années, qui s’appelait « Un monde sans les hommes », où on dressait le portrait d’une femme qui témoignait de son choix de ne plus approcher les hommes et ne s’autorisait à coucher avec eux que par téléphone, pour éviter tout contact. J’ai bien l’impression qu’on était juste des visionnaires, en fait ! Concernant Polanski, je ne suis pas juge et il me semble que les César non plus. Je trouve ça juste regrettable que le sujet de l’antisémitisme, abordé dans ce film, ait totalement été balayé d’un geste.

Photo de Camille Nahum Jewpop

Photo © Manuel Duran

“L’effet kiss cool sépharade”

Jewpop : Dernières questions. Pour une juive tunisienne, tu as l’air de sortir tout droit d’un shtetl de Pologne. Ça aide pour pécho ? Es-tu un tantinet schizo ? Est-ce que tu avales de la daf en écoutant du Rachmaninov ?
C.N. : Alors oui, ça aide de ressembler à une ashkénaze quand on est sépharade, car on ne m’associe pas immédiatement à la Goulette ni au Sentier, et on me prend limite pour une intello. Le deuxième effet kiss cool sépharade (quand je l’avoue) rassure les gens sur le fait qu’on va sûrement se marrer avec moi et qu’on va bien bouffer aussi. Donc oui, j’aime beaucoup ce camouflage involontaire qui me permet de jouer les agents doubles en fonction des circonstances.

Entretien réalisé par Alain Granat

Le site de Camille Nahum

La page Facebook de Camille Nahum

Copyright photos : photo de une Manuel Duran / Nicolas Cachelin /DR

Article publié le 12 mars 2020. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2020 Jewpop
 

Laisser un commentaire

Your email address will not be published.

S'abonner à la jewsletter

Jewpop a besoin de vous !

Les mendiants de l'humour

#FaisPasTonJuif