Jewpop a sélectionné pour vous 8 livres à emporter dans vos valises et à dévorer sur la plage, ou bien douillettement installé(e) dans votre lit !
Cette année, nos coups de cœur sont nombreux ! Parmi les 8 livres que la rédaction a choisi, vous trouverez forcément votre bonheur, entre romans, essais, biographies, nouvelles…
Incidents au fond de la galaxie, d’Etgar Keret (L’Olivier)
Si vous êtes fans de nouvelles et avez adoré son précédent recueil Sept années de bonheur, précipitez-vous sur le nouvel Etgar Keret. L’écrivain israélien traduit en 42 langues, scénariste de BD, auteur et réalisateur avec sa compagne Shira Geffen, reste l’un des derniers maîtres du genre. Sans doute moins hilarantes que les précédentes, jouant sur l’absurde et la démence du monde, ces nouvelles s’attachent à dépeindre des humains perdant leurs repères et pris de folie douce. Tel cet homme fortuné dans « Bon anniversaire tous les jours », qui décide de racheter les dates d’anniversaire de ses contemporains pour profiter de coups de fils, cadeaux, fêtes… afin de tromper son ennui. L’univers fantasque de Keret et ses personnages inadaptés, perdus dans la technologie, sont particulièrement touchants, rivalisant d’humour et de tendresse pour tenter de survivre. 22 nouvelles entre rire et larmes, antidotes à tous les maux.
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Ce que nous sommes, de Caroline Bongrand (Denoël)
« Les dentistes m’ont toujours dit que j’avais des racines de dents extraordinairement longues. Mon corps cherche aussi ses origines ! » expliquait la romancière et scénariste Caroline Bongrand au Figaro à l’occasion de la sortie début janvier de Ce que nous sommes. C’est qu’il est bien question de racines, familiales, dans ce roman autobiographique voguant entre journal intime et fresque d’une rare densité (112 pages ébouriffantes !) où l’auteure nous plonge dans un tourbillon mémoriel, à la recherche d’un héritage perdu. On y retrouve pêle-mêle Proust, les Beatles, une extraordinaire “maison arabe” à Orsay, Pierre Laval, une lignée de femmes et d’hommes exceptionnels et parfois brisés, protestants et israélites, comme se qualifiaient jadis certains juifs de France. Et des histoires soigneusement cachées. Des secrets de famille qui se dévoilent face à l’opiniâtre enquête que mène Caroline Bongrand, doublée d’une passionnante réflexion sur le phénomène scientifique des “traumatismes par héritage”. L’auteure se met à nu dans ce bouleversant exercice de reconstruction par l’écrit, et nous offre un récit émouvant et fascinant, empli d’optimisme.
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Beyrouth entre parenthèses, de Sabyl Ghoussoub (l’Antilope)
Après Le nez juif (L’Antilope), premier roman du jeune auteur d’origine libanaise maronite (“ascendant communiste”) encensé par la critique (et par Jewpop) à sa sortie en 2018 – qui le comparait alors volontiers à Woody Allen – Sabyl Ghoussoub livre un nouvel opus enthousiasmant. Il y est toujours question d’identités multiples, d’un impossible et tragi-comique séjour en Israël, et bien sûr du Liban (ravagé aujourd’hui par une crise économique sans précédent après les espoirs déçus de la “révolution d’octobre”, mais cette actualité n’est pas l’objet du livre…). Divisé en deux parties, ce court roman, toujours dans la veine autofiction de l’auteur, nous entraîne d’abord dans une salle d’interrogatoire de l’aéroport Ben Gourion. Burlesque et ubuesque, dialogué avec maestria, l’interrogatoire qu’y subit le héros est un sommet du genre. La seconde partie nous emmène à Tel-Aviv et se clôt à Metoula, ville israélienne de Haute-Galilée frontalière du Liban. Une bourgade à l’image des questionnements identitaires de l’auteur. Entre parenthèses et paradoxale. Metoula, décor de cinéma improbable d’un western moyen-oriental, avec sa rue principale bordée de quelques chalets alpins, d’un hôtel dans son jus qui semble tout droit sorti d’une station de ski autrichienne des années 60, et au bout de la rue, une longue frontière de barbelés à laquelle est adossé un mirador surveillant le Liban proche de quelques dizaines de mètres. Bienvenue dans le monde désespérément réjouissant de Sabyl Ghoussoub.
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Soit dit en passant, de Woody Allen (Stock)
Dans son autobiographie publiée en France après l’auto-censure déplorable de son premier éditeur américain, Woody Allen consacre une centaine de pages à l’affaire qui lui valut des accusations d’abus sexuels sur la fille adoptive de Mia Farrow, devenue son épouse. Accusations dont il livre ici sa version des faits, et dont il fut définitivement blanchi par la justice. C’est de loin l’épisode le moins intéressant de l’ouvrage. Reste un peu plus de 400 pages de confidences sur sa jeunesse et son parcours de cinéaste, qui régaleront ses fans. Avec son sens de la formule imparable, l’auteur et réalisateur revient sur ses parents « aussi mal assortis que Hannah Arendt et Frank Sinatra, ils n’étaient d’accord sur absolument rien, à part Hitler et mes bulletins scolaires. », sur son amour des acteurs, sa passion pour l’écriture, faisant preuve d’une immense humilité. Drôle, passionnante et tendre, son autobiographie constitue l’épitomé des névroses ashkénazes, avec cette vision emblématique d’une existence hantée par la perspective de la mort : «certaines personnes voient le verre à moitié vide ; d’autres, à moitié plein. Moi j’ai toujours vu le cercueil à moitié plein. »
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Le Dernier juif de France, de Hugues Serraf (Intervalles)
Quatrième roman du journaliste et écrivain Hugues Serraf, Le Dernier juif de France est une farce jubilatoire visant allègrement une certaine presse magazine française. Le tout sur fond d’antisionisme et d’antisémitisme bon teint. Imaginez L’Obs repris en main par un clone d’Edwy Plenel, débarquant en force avec sa clique de jeunes journalistes aux dents longues et à la culture crasse pour mettre au pas de vieux briscards de la profession. Façon Tonton flingueur, l’auteur dézingue ce petit monde à tout va et se moque avec esprit des travers de certains de ses confrères, brocardant les radicalismes de tous bords. On rit souvent (jaune) au fil des pages, qui pourraient être transposées dans d’autres cadres professionnels, et qui sous couvert de comédie laissent un goût amer. Son roman est dédié aux 13 victimes françaises des attentats et crimes antisémites de la dernière décennie.
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Nuits d’été à Brooklyn, de Colombe Schneck (Stock)
En août 1991, trois jours d’émeutes virent s’affronter juifs et noirs américains dans le quartier de Crown Heights. Ces événements posent le cadre du nouveau roman de Colombe Schneck, qui s’inspire ici de sa propre expérience de jeune stagiaire à New York pour conter l’histoire d’Esther, stagiaire au bureau du Monde de la Grosse pomme, qui vit une histoire d’amour clandestine avec Frederick, professeur de littérature française à l’université de New York et spécialiste de Flaubert. Esther est blanche, bourgeoise parisienne et juive, Frederick est noir et marié, père de famille et de dix-sept ans son aîné. Publié avant le meurtre de Georges Floyd, ce beau roman, parfois grinçant, prend aujourd’hui une résonance particulière, dressant le constat d’une Amérique où racisme et antisémitisme fleurissent sans distinction de classe ni de couleur. Près de 30 ans après les émeutes de Crown Heights, rien n’a changé, malgré l’espoir qui porte l’auteure.
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Mufti, de Yves Azéroual, (Le passeur)
Pour son premier roman, le journaliste, réalisateur de documentaires et producteur Yves Azéroual retrace le parcours du Grand Mufti de Jérusalem Amine al-Husseini, à travers un thriller historique qui se dévore de bout en bout. De sa participation au génocide des Arméniens à sa volonté d’exterminer les juifs du Moyen-Orient, de sa collaboration avec les nazis à son bref exil en France après-guerre, l’auteur passe au crible l’histoire de ce sulfureux personnage, toujours adulé dans les sphères islamistes radicales et par nombre de Palestiniens. Un travail d’enquête solide, doublé d’un vrai sens du récit. On le verrait parfaitement adapté à l’écran avec Ryan Gosling dans le rôle principal. Sa ressemblance avec Amine al-Husseini est frappante.
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Éloge de la défaite, dialogue avec Jérémie Peltier, de Laurent-David Samama (L’aube)
Dans cet essai, le journaliste et écrivain Laurent-David Samama dialogue avec Jérémie Peltier, directeur de la Fondation Jean Jaurès, sur l’art de la loose, ou pourquoi l’échec est source de réussite. Un concept totalement ancré dans la culture anglo-saxonne, mais qui reste encore abscons dans notre culture européenne. L’échange est anglé sport (Laurent-David Samama connaissant bien le monde du football) et politique (l’auteur a consacré son précédent essai, Les petits matins rouges aux champions du genre, les trotskystes). Et en parfait amateur de ballon rond, il ne manque pas de souligner que sans défaite, pas de remontada. Essai transformé !
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Sélection réalisée par la rédaction de Jewpop
© photo et visuels : DR
Article publié le 30 juillet 2020. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2020 Jewpop